Grenade : un héritage pour l’Europe. Le Don des ruines dans Les Aventures du dernier Abencerage de Chateaubriand
Résumé
Le Dernier Abencerage peut être lu comme un tombeau pour une société brillante, Grenade, décrite comme un creuset pour deux civilisations : la civilisation européenne et la civilisation arabe. Quelle place le récit donne-t-il au royaume maure de Grenade dans l’Europe ? La prise de Grenade, racontée par Chateaubriand, n’est plus pensée comme le triomphe de l’Europe chrétienne sur l’Orient musulman, mais comme la destruction d’une partie de le culture européenne. Aben-Hamet, à la fois maure et arabe, qui ne reconnaît d’autre patrie que Grenade, porte la substance culturelle de l’Europe, par les langues qu’il parle, par la courtoisie dont il se fait le champion, comme par les codes d’honneur qui le définissent. La société maure de Grenade est donc présentée par le texte comme indigène, authentiquement européenne. L’héritage de cette société européenne est-il à jamais perdu ? Visible sous forme de ruines, et de fragments de calligraphie arabe, la fiction en déploie le muet langage. Ainsi le lecteur est-il invité à retrouver cet héritage, à en éprouver le caractère sublime et prophétique.