Les amibes libres peuvent être rencontrées dans les environnements aquatiques naturels (eaux de rivière), dans les réseaux de distribution d’eau de consommation humaine et dans les circuits de refroidissement industriels (CRF). Certains CRF sont confrontés au développement de l’amibe pathogène pour l’homme Naegleria fowleri, pouvant en cas d’inhalation conduire à une méningo-encéphalite amibienne primitive. L’écologie de cette amibe libre, flagellée et thermotolérante, reste très peu documentée. Outre le facteur température, qui est connu pour être impliqué dans l’occurrence de cette amibe, d’autres facteurs sont susceptibles d’influencer sa croissance et sa survie. Cette étude s’inscrit dans un projet ayant pour objectif de mieux appréhender les facteurs biotiques et abiotiques influençant le développement de N. fowleri en présence de biofilm. La principale contrainte liée à ce type d’étude est de pouvoir maintenir pendant plusieurs semaines une population amibienne artificiellement implantée dans un système présentant un biofilm complexe comme principale ressource nutritive. Pour ce faire, nous avons élaboré un « réacteur plan à surface libre » qui apporte une importante surface de colonisation (1440 cm2) et qui facilite l’échantillonnage. Les conditions hydrodynamiques de ce réacteur ont été définies au travers d’une étude préalable. Le réacteur, d’un volume total de 2,7 litres, est en circuit semi-fermé alimenté en continu par de l’eau de rivière. L’écoulement appliqué est de type laminaire et caractérisé par un débit de circulation de 810 mL min-1, une vitesse moyenne d’écoulement de 1 cm s-1 et un taux de cisaillement de 17 s-1. Le temps de séjour moyen est de 24 h. La température du réacteur est maintenue tout au long de l’expérience à 32°C qui correspond à la température seuil de développement du pathogène dans l’eau des CRF. Les bactéries provenant de l’eau de rivière constituent un biofilm colonisant les surfaces du réacteur et qui doit apporter les ressources nutritives nécessaires au développement des amibes. N. fowleri est introduite en une seule injection dans l’eau du réacteur. Le suivi de la flore microbienne est réalisé par des mesures d’amibes libres (recherche du nombre le plus probable), de N. fowleri (analyse immuno-enzymatique) et de la flore bactérienne totale (épifluorescence) et cultivable (milieu PCA). Les résultats montrent deux phases : une première phase de colonisation du support par la flore bactérienne, suivie d’une seconde phase d’apparition de la population d’amibes libres concomitamment à un abattement de la flore bactérienne. Ceci est noté dans les deux compartiments : biofilm et eau. N. fowleri est alors injectée dans le réacteur, et son installation est observée dans le biofilm de 25 à 160 h après son inoculation. La présence du pathogène est encore détectée dans le biofilm jusqu’à 15 jours après son introduction. Le montage expérimental (réacteur, outils métrologiques et conditions expérimentales) permet bien l’installation de l’amibe N. fowleri. Dès lors, l’étude de l’écologie de N. fowleri peut être envisagée.