Les actes et chroniques ont largement rapporté les débats des conciles généraux du XVe s., en particulier ceux relatifs à leur mode de fonctionnement interne et à la manière dont y étaient construites les décisions conciliaires. Il est donc intéressant de s’interroger sur la répercussion éventuelle de ces débats dans ces réunions locales, sachant que nombre des participants des conciles provinciaux français du XVe siècle sont passés aussi par les conciles généraux. Quelle est donc forme que peuvent y prendre les échanges et la manière dont y sont construites les décisions conciliaires : quelle est la part de collégialité réelle dans ces décisions ? Cette collégialité de la décision est-elle limitée aux évêques ou s’ouvre-t-elle davantage ? Quel y est le poids de l’archevêque ? Comment sont concrètement préparées, élaborées, rendues les décisions ? Autant de questions auxquelles il est possible d’essayer de répondre pour le XVe siècle grâce à la conservation de dossiers d’archives relativement fournis pour certains conciles provinciaux, en particulier pour les provinces de Sens et de Reims, sur lesquelles sera ciblé le propos (5 des 8 conciles provinciaux y ont laissé des archives fournies). Cette communication traite d’abord aux travaux préparatoires au concile, en ce qu’ils jettent les bases pour la future prise de décision et qu’ils marquent déjà certains enjeux liés aux prises de décision, notamment la question du poids des évêques au sein du concile. Puis est considérée l’organisation de la prise de décision durant l’assemblée elle-même, en évoquant la participation réelle ou contournée, selon les cas, de l’ensemble des membres du concile à la construction de la décision finale, par l’organisation en commissions, mais aussi à travers le vocabulaire utilisé pour qualifier la prise de décision, qui insiste plus ou moins, selon les assemblées, sur le rôle décisionnaire de l’archevêque. Enfin cette communication traite de la question de la justification de la prise de décision, que ce soit via sa mis en scène et, surtout, via sa contestation : la légitimité du concile à prendre des décisions en cas de faible affluence sera ainsi évoquée, de même que la mise à distance par avance des conséquences des décisions par les exempts et privilégiés. Pour conclure, on voit en coulisses se jouer des pressions, des tractations qui témoignent du fait que les décisions en débat n’emportent pas forcément d’emblée l’accord de tous, mais ces négociations sont en partie gommés par les documents réalisés, dans lesquels l’unanimité apparente est une nécessité, pour donner force aux décision. Malgré l’ouverture des conciles provinciaux à de très nombreuses personnes et l’ampleur des groupes rassemblés, on constate au final un poids prépondérant des évêques. L’association des chapitres ou autres prélats n’est pas pour autant totalement factice, car les prélats ne peuvent clairement pas faire comme s’ils n’étaient pas là : ils sont obligés au minimum de préserver les apparences, et bien souvent de tenir compte de leurs positions pour ne pas les heurter de front, au risque de fragiliser leurs propres décisions et positions. En fait, plus encore que leur contenu, l’enjeu des ces prises de décisions est souvent de déterminer qui sera ou pas soumis obligatoirement à ces décisions et de marquer la place de chacun au sein de la communauté provinciale.