Comment la justice peut-elle servir à l'assujettissement de populations et de territoires au pouvoir d'un Prince ? Quelle place tient-elle dans la représentation et la justification de ce pouvoir ? Comment les affaires judiciaires sont-elles instruites dans les juridictions de la première modernité ? Quel statut l'exercice de la justice fournit-il aux magistrats dans la société d'ordres ? Quels rapports les femmes et les hommes ordinaires des sociétés des XVIe et XVIIe siècles entretiennent-ils avec les cours de justice ? Comment sont châtiées les personnes reconnues coupables de comportements regardés comme illégaux ? Ces questions, classiques en histoire judiciaire, sont généralement abordées isolément les unes des autres. Le présent volume entend faire dialoguer ces approches, en réunissant les communications de spécialistes de ces questions ayant tous travaillé un même terrain, la Lorraine des XVIe et XVIIe siècles. Les caractéristiques atypiques de celui-ci se prêtent particulièrement bien à cet exercice. En effet, cet espace, divisé entre les duchés de Lorraine et de Bar, d'une part, et les Trois-Évêchés, d'autre part, est le théâtre d'une rivalité constante entre le pouvoir royal français, le pouvoir ducal indigène et le pouvoir impérial germanique. Dans ces terres de frontières, la complexité du fait judiciaire tient également aux rapports de compétition, mais aussi de complémentarité qui s'établissent entre les juridictions, ainsi qu'à l'existence de différentes conceptions de la justice et des pouvoirs qui influencent cet espace.