Effet du phosphate sur les interactions bactéries-produits de corrosion en réseau de distribution d'eau potable
Abstract
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Bien que l'eau produite en sortie d'usine de traitement réponde aux différents critères de potabilité, son passage au sein du réseau de distribution est susceptible d'entraîner des modifications dans sa composition, aboutissant ainsi à une dégradation de sa qualité à son arrivée aux points de consommation. Les réseaux constituent en effet des systèmes complexes, où la flore bactérienne est le principal réactif biologique, et les oxydes de fer formés par la corrosion du métal représentent généralement les minéraux les plus fréquemment rencontrés. L'ajout de phosphates sous différentes formes (acide orthophosphorique, polyphosphates, orthophosphate de zinc...) est actuellement pratiqué dans l'eau potable afin principalement d'abaisser les concentrations de métaux comme le plomb, le cuivre et le zinc, issus du relargage par certains types de canalisations. Si les matériaux visés par ce type de traitement sont le plus souvent des constituants du réseau domestique, les ajouts sont généralement appliqués en sortie d'usine et transitent de ce fait d'abord par le réseau public. Les travaux présentés ici ont porté sur les interactions existantes entre bactéries et oxydes de fer en réseau de distribution d'eau potable et sur les modifications apportées à ce système par la mise en place d'un traitement aux orthophosphates. La caractérisation des produits de corrosion par spectroscopie Mossbauer, diffraction des rayons X et microscopie électronique, avant et pendant un traitement, a montré la transformation de certaines espèces comme les rouilles vertes, qui disparaissent progressivement au profit de la vivianite. La formation de ces minéraux ferreux est par ailleurs liée à la présence de bactéries ferriréductrices, dont l'activité est également à l'origine de la croissance des tubercules de corrosion, et de la dissolution partielle des oxydes ferriques conduisant à l'augmentation de la concentration en fer dans l'eau. Parallèlement, le rôle d' accepteur d' électron du fer(III) favorisent l'activité bactérienne dans les zones à faibles teneur en oxygène. Des essais conduits en anaérobiose ont ainsi montré une augmentation significative de la cultivabilité pour une souche d'E. coli en présence d'oxyhydroxyde ferrique. Le caractère limitant du fer en tant que nutriment bactérien a par ailleurs, pour la première fois été mis en évidence dans l'eau potable. Les anions phosphate entraînent des modifications dans les charges de surfaces de oxydes ferriques qui conduisent à la diminution de l'adhésion bactérienne. En contre-partie, les ajouts de phosphate ont entraîné l'augmentation de la concentration en fer dans l'eau et dans certains cas, des augmentations de la croissance bactérienne liée au rôle de nutriment du phosphore. Les différents types de tests dynamiques, statiques, en présence ou en absence de matériau corrodé ont également mis en évidence l'importance des conditions expérimentales dans les résultats obtenus et la difficulté d'appréhender l'impact des traitements à l'aide d'essais de laboratoire. Les effets secondaires liés à l'utilisation de ce type de traitement ne sont pas toujours d'une incidence négligeable et peuvent conduire à une dégradation importante de la qualité sanitaire de l'eau distribuée. Les résultats obtenus au cours de la présente étude incitent à la prudence et à la prise en compte du risque lié à l'impact des traitements phosphate,jusqu'ici souvent sous-estimé.