Méga-mines d’or, enfouissement de déchets nucléaires, implantation d’usines, de centres commerciaux ou de parcs éolien, on ne compte plus les projets industriels, extractifs ou d’aménagement qui suscitent des oppositions collectives, en dépit de dispositifs « concertatifs » censés garantir une certaine forme de consensus entre les décideurs, les acteurs économiques et les citoyens. Inversant la perspective courante des recherches sur les mobilisations et les controverses environnementales, qui est de comprendre pourquoi un projet est contesté, cette recherche essaie, à partir d’un cas précis – une controverse localisée autour d’un projet de développement de « gaz de couche de charbon » en Moselle ̶ d’analyser les mécanismes par lesquels un projet est justement soustrait à la discussion. Pourquoi un projet sujet à controverse est-il soutenu par une majorité des acteurs politiques, scientifiques, institutionnels, économiques et médiatiques du territoire, quand à l’inverse ses opposants sont délégitimés, et leurs positions, discréditées et passées sous silence ? Il s’agit, à partir d’une recherche impliquée centrée sur l’analyse de tous les discours qui circulent dans l’espace public autour de ce projet, de décrire les mécanismes sociaux, politiques et surtout discursifs qui aboutissent à fabriquer un consensus apparent, à neutraliser la controverse, et, en définitive, à rendre le projet gazier indiscutable.