Le transfert de pesticides d’origine agricole vers les eaux, malgré les différents plans nationaux et européens mis en place, reste à l’origine de la dégradation de masses d’eau vis-à-vis de la réglementation et est susceptible d’induire de multiples effets délétères sur les biocénoses. Dans le cas de sols drainés, le rejet des eaux issues de la parcelle se fait souvent directement dans le cours d’eau et, de ce fait, les bandes enherbées réglementaires le long des cours d’eau, s’avèrent inutiles. La mise en place de Zones Tampon Humides Artificielles (ZTHA) est une solution pour limiter ces transferts mais les études préalables montrent une efficacité hétérogène selon les molécules et les années hydrologiques de 0% à 75%, avec une moyenne de 15% (Pierlot et al., 2020). Accroître l’efficacité d’abattement de ces dispositifs constitue ainsi un enjeu prometteur au regard de l’adhésion des exploitants agricoles et de l’efficacité déjà démontrée de ces dispositifs, complémentaires des solutions agronomiques promues pour réduire et améliorer l'utilisation des produits phytosanitaires. L’aptitude de Biochar à séquestrer les contaminants font de ces produits issus de la pyrolyse de biomasse, un amendement utilisé pour séquestrer le carbone ou mêmes les contaminants organiques ou métalliques des sols pollués. Ces propriétés pourraient être mises à profit pour accroître les capacités de rétention des contaminants d’origine agricole, au sein des ZTHA. L’intérêt d’utiliser des biochars dans ce but vient i) de la disponibilité et de la variété des matières premières d’origine agricole sur les territoires concernés : ii) du fait que ces matières premières peuvent être transformées de façon peu impactante d’un point de vue environnemental et énergétique afin de produire des adsorbants dans le cadre d’une économie circulaire de territoire responsable et iii) l’utilisation des biochars ne requiert pas l’intégration d’une cascade de procédés (systèmes membranaires avec prétraitement de coagulation-floculation,...), ce qui limite fortement leur coût d’exploitation et ne génère pas de nouveaux effluents pollués concentrés et donc la nécessité d’un stockage ou d’une étape de traitement ultime. L’utilisation de biochar paraît une alternative intéressante pour améliorer ces dispositifs. Afin d’apprécier le potentiel des biochars à retenir les contaminants d’origine agricole en ZTHA, notre projet intègre plus étapes dont une revue bibliographique et des tests de séquestration en laboratoire dont les premiers résultats semblent prometteurs. Ainsi, la revue de la bibliographie mettant en œuvre des biochars pour traiter les PPP dans les eaux nous a permis de répertorier au cours de ces six dernières années, 400 articles scientifiques récents sur le sujet de l’adsorption des pesticides par les biochars. Ces travaux permettent d’apprécier les capacités encourageantes d’adsorption de ces produits, sans qu’il soit possible de relier ces résultats aux caractéristiques des pesticides ni des biochars, tant les conditions d’utilisation et les ratios de biochar / pesticides sont différents dans ces études. Les tests en laboratoire réalisés avec un biochar issu de paille de colza locale et visant à évaluer ses capacités d’adsorption du S-métolachlore et de son principal métabolite (Metolachlore-ESA) nous a permis de séquestrer 60% de la quantité de substance active en 48h. Les étapes suivantes consisteront donc à caractériser les interactions entre la lame d’eau drainée et les biochars (rôle des sédiments, interaction avec la dynamique du drainage, recyclage du biochar…) avant d’intégrer cette solution dans les ZTHA à des proportions compatibles avec une viabilité technique et économique.