Approche littéraire attentive aux expressions de l'animalité dans les textes du canon littéraire ou dans les œuvres délaissées voire oubliées, la zoopoétique s'est plutôt concentrée sur les œuvres modernes et contemporaines que sur les productions lettrées de la première modernité. Par ailleurs, la période de la querelle de l'âme des bêtes apparaît, dans les études animales contemporaines, comme le moment de la naissance d'un réductionnisme radical, incarné par l'hypothèse dite de l'animal-machine formulée dans le Discours de la méthode (1637) par Descartes, dans le contexte d'une explication mécaniste du fonctionnement du cœur humain. Cette hypothèse, largement détournée dans les décennies qui suivent sa formulation, se répand, se développe et se transforme au gré de ses réceptions, avec la diffusion du cartésianisme dans les milieux savants et profanes.Cette thèse propose d'étudier les interactions réciproques entre les Belles-Lettres et la querelle de l'âme des bêtes (1637-1764) et espère montrer que la question de la nature animale a stimulé la créativité littéraire et a conduit à l'émergence de nouveaux modes de représentation ou d'expression de l'animalité. L'analyse des choix stylistiques, linguistiques et narratifs des productions lettrées qui mettent en scène une figure et/ou une voix animales - qu'elles contestent, nuancent, valident ou détournent l'hypothèse - révèle que les Belles-Lettres constituent un laboratoire de formes où l'animal agit comme un réactif esthétique. De ce fait, les discours animaux du temps de la querelle offrent un observatoire original pour interroger les conditions de la mutation des Belles-Lettres en Littérature, qui se joue au cours de la période observée.